A propos de la calligraphie chinoise

« Activité intérieure »
Lorsque la main de l’artiste évolue librement à l’image de l’écriture automatique, c’est le corps actif tout entier qui est à l’œuvre.
L’œuvre d’art réellement vivante est produite par ce corps actif dans son ensemble, le sens de la vision n’est qu’auxiliaire.

« Beau »
La notion de beau.
Un « objet » est beau lorsqu’il est en mesure de gérer une activité intérieure rythmée et bien organisée.

« Concentration »
La « posture » du calligraphe lui permet de garder le contact avec les richesses profondes du corps propre. Il lui suffit de se mettre en position, « sa posture », pour accéder au silence et retrouver la sérénité.
Il fait donc l’expérience du « grand calme » qui, en d’autres termes, s’apparente à l’infini, celui que le corps actif éprouve dans cet état de paix.
Synchronisation de tous les mouvements, volonté ferme et une sorte d’attention flottante qui laisse les muscles libres d’organiser les ressources de l’activité intérieure. Cette attention ainsi fixée installe un espace intérieur propice à la naissance d’un geste artistique abouti.

« Énergie »
Lorsque les énergies se nouent et circulent de manière harmonieuse au sein du corps actif du calligraphe, ses mouvements et ses traits seront qualitatifs.
Si les énergies ne sont pas correctement canalisées le résultat de l’écriture sera décevant.

« Force »
On demande à l’élève d’éprouver complètement de toutes ses forces, de ressentir fortement au bout du pinceau, l’action de l’encre et de mettre dans l’écriture la force du corps entier.
La force désigne l’intensité avec laquelle l’artiste exprime son geste. La puissance de mobilisation des forces est sans rapport avec l’envergure et l’ampleur des gestes extérieurs. Il est possible de mobiliser des forces importantes dans les petits caractères.
On dit qu’un caractère a de la force lorsqu’il possède une structure puissante et qu’il semble chargé d’une grande énergie.
Aussi, face à une œuvre d’art de haut niveau et chargée d’une grande force, un spectateur peut éprouver un bouleversement.
La calligraphie possède, en effet, le pouvoir de mettre en ébullition, le corps actif du spectateur, de provoquer chez lui un sentiment de circulation généralisé des énergies.
Suivant des yeux les circonvolutions des caractères, le spectateur, par une sorte de phénomène de résonance, absorbe la mobilité intérieure des signes et de leur imaginaire fait d’activité pure.
Telle est l’émotion sublime qu’une œuvre supérieure peut faire naître sur une âme sensible.

« Intention »
Ce qu’il est essentiel de retenir : aucun geste ne peut engendrer de forme expressive et d’émotion s’il ne procède pas d’une disposition intérieure.
Dame Wei (272-349) : « On échoue lorsque le pinceau précède l’intention. On réussit lorsque l’intention mène le pinceau. »

« Sacré »
Le sacré prend sa source dans l’harmonisation des énergies complémentaires qui peuplent l’univers et, notamment, dans le corps propre de l’homme.
C’est pour cette raison que les chinois accordent tant d’importance aux potentialités créatrices du corps propre qui sont ressenties comme un appel transcendantal.
L’art de la calligraphie est un moyen de parvenir à la voie sacrée de la sagesse, car, pour les orientaux, cet art constitue une activité qui touche au sacré.

Claude Mediavilla
Extraits de son livre l’ABCdaire de la Calligraphie Chinoise
Abécédaire Claude Mediavilla
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